Billet

[COP21] 3 questions à Alain Geldron #économiecirculaire

Tous les mois, un expert de l’ADEME décrypte un enjeu clé pour le climat.

Ce mois-ci, Alain Geldron répond à 3 questions sur l’économie circulaire.

Visuel 3 questions a AGeldron

Question 1 : Quels sont les grands enjeux de l’économie circulaire ?

Depuis 1930, la population de notre planète a plus que triplé et devrait encore être multipliée par 1,5 d’ici la fin du siècle. Dans le même temps, l’aspiration légitime à un meilleur niveau de vie de tous les habitants renforce la pression sur les ressources naturelles. Ainsi les prélèvements de biomasse, d’énergies fossiles et de minerais ont été multipliés par dix en un siècle. Au rythme actuel, cette consommation sera encore multipliée par deux d’ici 2050. Les conséquences sont multiples : dégradation des sols et modification de leurs usages, augmentation des émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, responsable  du dérèglement climatique, difficulté d’accès à une eau de qualité ou en quantité dans de nombreux pays y compris développés, extinction de nombreuses espèces naturelles.

Le modèle de croissance du monde occidental, et sa généralisation aux pays en voie de développement ne peut perdurer sans mettre en péril  la qualité de vie et le bien-être de l’humanité dans un avenir relativement proche. Le modèle doit changer pour rendre plus efficace l’utilisation des ressources : qu’il s’agisse à la fois de limiter leur consommation au niveau mondial et d’en diminuer l’impact sur l’environnement. Dans ce domaine, le monde occidental doit à nouveau montrer l’exemple pour être crédible.

Question 2 : Comment l’économie circulaire peut-elle contribuer à relever le défi du changement climatique ?

Le développement de l’économie circulaire, en visant une réduction de la consommation de ressources et, par conséquent, une réduction des émissions de gaz à effet de serre engendrées par l’exploitation de ces ressources, constitue un cadre d’action indissociable de la lutte contre le changement climatique. En effet au travers d’une production plus frugale, d’une consommation plus sobre et du développement du recyclage, la moindre consommation de certaines ressources induit directement un moindre recours aux énergies en particulier aux énergies fossiles. La fabrication de produits à faible consommation d’énergie et dotés d’une durée de vie plus longue conduit logiquement à moins émettre de gaz à effet de serre. De même, des comportements d’achats plus raisonnés (faire durer les biens, acheter des produits de seconde main par ex) ou le recours au partage induisent aussi une réduction des émissions affectant le climat. Le recyclage des matières premières est plus économe en énergie  – et donc en émissions – que la fabrication de cette même matière à partir de ressources naturelles. Ainsi le recyclage d’une tonne d’acier ou d’une tonne de plastique permet de diminuer les rejets de près de deux tonnes d’équivalent CO2. Pour l’aluminium, ce sont plus de neuf tonnes de CO2 qui sont économisées grâce au recyclage.

Question 3 : Quelles sont les avancées en France ?

Au plan national, au travers du projet de loi sur la transition énergétique pour la croissance verte, la France positionne la lutte contre le changement climatique et l’économie circulaire au cœur de ses politiques économiques et environnementales. L’objectif d’augmenter, au travers d’une stratégie d’économie circulaire actualisée tous les cinq ans, la productivité des ressources (rapport entre le PIB et le tonnage de matières premières) de 30% entre 2010 et 2030, associé à la diminution de la consommation par habitant, constitue un outil déterminant de l’évolution de notre société vers une économie circulaire et sobre en carbone. De tels objectifs ne sont pas suffisants sans l’engagement de tous les acteurs : or, nous pouvons constater que les territoires à tous les niveaux développent des stratégies ou des plans d’action pour adopter une gestion plus efficace et économe de leurs ressources.

Territoires à énergie positive pour la croissance verte,  territoires zéro déchets zéro gaspillage, appels à projets sur l’économie circulaire : les initiatives se multiplient pour développer localement une économie plus efficace et moins sensible à la disponibilité des ressources et aux fluctuations des cours des matières premières.

Pour les entreprises, la recherche d’une économie de matière première est en général gagnant-gagnant : gagnant pour sa profitabilité comme pour l’environnement. Des entreprises vont encore plus loin en changeant leur modèle économique, vendant un service plutôt qu’un bien. Ce modèle, encore émergent, d’ « économie de la fonctionnalité » ne demande qu’à être développé, sous réserve de valider à chaque fois ses bienfaits.

Alain GELDRON, expert national Matières Premières à l’ADEME depuis 2013. Il était précédemment chef du Service Filières responsabilité élargie du producteur et Recyclage de 2004 à 2013.

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