Billet

#SIA2018 [Étude] Réduire les émissions de GES du secteur agricole tout en améliorant la rentabilité économique des exploitations

En France, le secteur agricole représente environ 20% des émissions de gaz à effet de serre (GES). Des études récentes ont mis en évidence que certaines actions techniques d’atténuation seraient à « coût négatif », c’est-à-dire qu’elles permettraient de réduire les émissions de GES du secteur agricole tout en améliorant la rentabilité économique des exploitations. Il s’agit d’actions comme l’introduction de légumineuses dans les rotations, la fertilisation organique ou encore l’enfouissement des engrais. Cependant, ces actions ne sont pas spontanément mises en place par les agriculteurs. L’ADEME a publié les résultats du projet de recherche BANCO mené par I Care & Consult, l’INRA et le Céréopa, qui approfondit l’analyse économique de ces actions, identifie les freins et leviers pour faciliter leur déploiement, et guide les acteurs régionaux privés et publics dans la priorisation de leurs efforts.

Des potentiels d’atténuation variables selon les régions

Dans les résultats du projet BANCO, les potentiels d’atténuation et le coût des actions ont été régionalisés, pour mettre en lumière dans chaque région les actions à fort potentiel d’atténuation et à coût faible. Les potentiels d’atténuation régionaux varient fortement (de 4,4 MtCO2eq pour le potentiel total en Bretagne à 0,1 MtCO2eq en Corse), notamment en fonction de la surface agricole utile et du nombre d’animaux.

Sans considération de coût, les résultats révèlent que la majeure partie du potentiel d’atténuation semble se situer dans l’Ouest et notamment en Bretagne et Pays de la Loire. Ces régions d’élevage représentent en effet un fort potentiel de déploiement de la méthanisation. Egalement, en tant que région de productions végétales, le Centre semble présenter un important potentiel d’atténuation, au niveau notamment des actions de réduction de la fertilisation azotée ainsi qu’à la réduction du labour.

 

Des freins à la mise en place d’actions d’atténuation

Pour comprendre pourquoi ces actions d’atténuation à coût négatif ne sont pas spontanément mises en place par les agriculteurs, l’étude s’appuie sur des entretiens qualitatifs auprès d’acteurs de terrain (exploitants agricoles, coopératives agricoles, chambres d’agriculture, etc.). L’analyse a mis en lumière trois principaux types de freins rencontrés sur le terrain :

  • Des freins de type « investissements », liés à l’achat d’un nouveau matériel qu’ils n’acquerront que lorsque le précédent aura été amorti.
  • Des freins de type « compétences » renvoyant à une incapacité technique, pour un exploitant, de mettre en œuvre une action d’atténuation (ex. : gestion des mauvaises herbes en « sans-labour » ou avec des légumineuses).
  • Des freins de types « aversion au risque », pour certaines actions considérées comme trop risquées économiquement (ex. : réduction des protéines dans les rations des vaches laitières en élevage).

 

Des politiques publiques et des initiatives privées à renforcer pour encourager les agriculteurs

Enfin, le projet BANCO a mis en regard les freins rencontrés sur le terrain et les mesures de politiques publiques et privées existantes, afin d’identifier les éventuels manques et de formuler des recommandations pour lever les obstacles et diffuser plus largement les actions d’atténuation sur le terrain.

  • De manière générale, les freins de type « investissements », bien couverts par les mesures existantes (notamment, selon les régions, par les PCAE – Plans de compétitivité et d’adaptation des exploitations agricoles), n’ont fait l’objet d’aucune recommandation supplémentaire.
  • Les freins de type « compétences », « aversion aux risques » ou encore « information » sont peu couverts par les mesures existantes. La majorité des recommandations de l’étude portent sur des actions de sensibilisation et de formation des agriculteurs. Ces actions visent à accentuer la diffusion de certaines actions ne représentant pas de risque économique, (par exemple relatives à l’optimisation de la gestion des prairies). Elles pourraient être mises en œuvre par les structures techniques, situées au plus près des exploitants.
  • De leur côté, pour les pouvoirs publics, les recommandations de l’étude concernent l’ajustement de certaines mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC) existantes afin de les rendre plus favorables au déploiement de certaines actions d’atténuation, voire d’étudier la possibilité de mettre en place de nouvelles MAEC, par exemple en proposant un accompagnement financier pendant un temps donné pour favoriser la mise en place de nouvelles pratiques.
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