Communiqué de Presse

L’ADEME formule 8 recommandations pour accompagner les acteurs agricoles et forestiers dans l’adaptation au changement climatique

Le dernier rapport du GIEC[1] en 2021 souligne l’état d’urgence climatique actuel, une situation alarmante qui va s’accentuer dans les prochaines années et décennies. Des effets directs sont constatés comme l’augmentation de la température globale ou celle de la fréquence et de l’intensité des événements extrêmes. Les conséquences sont multiples et concernent l’ensemble des secteurs de la société, dont les secteurs agricole et forestier, fortement impactés par l’état d’urgence climatique. Les agriculteurs sont et seront notamment confrontés à des baisses de rendements dus à des périodes de sécheresse plus fréquentes et plus longues, des gels tardifs plus fréquents ou encore une modification du cycle végétatif. Par ailleurs, le changement climatique entraîne une dégradation de l’état sanitaire des massifs forestiers, avec des dépérissements importants de certaines forêts et certaines essences, ainsi qu’une augmentation du risque incendie. Afin de préserver tant la production de ressources (pour des usages variés : alimentation, matériaux, énergie) que les différents services écosystémiques apportés par ces secteurs (biodiversité, stockage de carbone, limitation de l’érosion…), il est important de mettre en place des stratégies d’adaptation au changement climatique fortes et durables.

Pour accompagner les acteurs, l’ADEME et ses partenaires ont réalisé une étude pour mieux comprendre les conditions de réussite des démarches d’adaptation au changement climatique dans les secteurs agricole et forestier et leurs filières et ainsi, éclairer les acteurs dans leurs démarches d’adaptation au changement climatique.

Qu’est-ce que l’adaptation au changement climatique ?

L’adaptation au changement climatique  correspond à l’ensemble des évolutions politiques, techniques, institutionnelles, sociétales et comportementales que les sociétés dans leur ensemble, ou plus spécifiquement les acteurs d’un secteur, devront conduire pour limiter les impacts négatifs du changement climatique.

 

La nécessité d’adaptation du secteur agricole face à l’urgence climatique

Le changement climatique est aujourd’hui un fait avéré, et va se poursuivre dans les prochaines décennies. L’enjeu est désormais de conjuguer deux actions : tout mettre en œuvre pour atténuer le changement climatique et également  savoir comment  répondre à ses conéquences. La récurrence des événements climatiques catastrophiques de ces dernières années a profondément touché les secteurs agricole et forestier et a donné à voir un véritable changement climatique. Les secteurs agricole et forestier, particulièrement exposés à des évènements climatiques répétés, prennent pleinement conscience  du coût des impacts actuels du changement climatique.

Des solutions existent déjà et sont accessibles, mais sont pour la plupart des solutions à court terme mises en œuvre en réaction à ces catastrophes, tandis qu’il faudrait aussi les intégrer sur un horizon de long terme. Cette anticipation est notamment nécessaire pour préparer les systèmes de production aux évolutions climatiques attendues, minimiser les dommages et relativiser le coût des actions à mettre en place.

Actuellement, les démarches d’adaptation sont mises en place de manière hétérogène d’une filière à l’autre. Par exemple, elles semblent occuper une place plus importante dans les filières vigne/vin, bovin lait ou encore les grandes cultures du secteur agricole. Dans le secteur forestier également, les démarches d’aptation sont bien présentes où les projets sont articulés autour de l’amont forestier d’essences spécifiques (frênes, chênes, hêtres, résineux, etc.) ou sur le choix des essences.

Les démarches pour aider les mondes agricole et forestier à s’adapter à l’urgence climatique

Afin d’accélérer l’adaptation des mondes agricole et forestier au changement climatique, il faut combiner plusieurs dimensions :

  • Une démarche d’anticipation visant à organiser dès aujourd’hui la résilience des territoires et filières aux impacts négatifs du changement climatique et en saisir les opportunités,
  • Une action collective regroupant tous les acteurs d’une filière ou de tout un secteur d’un territoire pour mieux comprendre les forces et les fragilités de la filière/du secteur et de ses composantes,
  • Une approche en synergie avec l’atténuation au changement climatique et la préservation de la biodiversité. 

L’ADEME a recensé dans son étude une centaine de démarches d’adaptation dans ces secteurs, aux niveaux national, européen, et international, avant d’en sélectionner 8 (4 dans le secteur agricole, 4 dans le secteur forestier) qu’elle a analysées pour mettre en évidence les facteurs clés de la mobilisation des acteurs sur cet enjeu, jusqu’à la mise en œuvre d’actions concrètes.

En s’appuyant sur l’analyse de ces démarches, l’agence a ensuite identifié 8 recommandations à destination des acteurs des secteurs et filières et des décideurs publics en vue d’initier et accompagner de nouvelles démarches.

Huit recommandations pour des démarches d’adaptation des mondes agricole et forestier au changement climatique

1) Définir l’échelle de travail la plus adaptée : entre filière et/ou territoire
• S’appuyer sur les signes de qualité (AOC, AOP, …), sources de meilleure valorisation économique et peu délocalisables du fait du lien existant entre la qualité et le territoire
• Accompagner la prise de conscience des consommateurs et citoyens qui par leur demande et leurs attentes agissent sur les autres maillons (production, transformation, distribution)
• Construire une vision commune autour de l’adaptation, associant les acteurs de l’amont et de l’aval
• Agir à l’échelle des massifs forestiers homogènes (du point de vue sylvoclimatique, c’est-à-dire au niveau de la typologie des peuplements, des sols et du climat, et de la gouvernance des acteurs)
• Mettre en place une concertation pour définir comment favoriser la résilience

2) S’appuyer sur les structures de portage existantes (autant que possible)
• Faciliter la mobilisation, l’appropriation des enjeux et le passage à l’action
• S’appuyer sur des acteurs motivés et légitimes
• Créer une nouvelle structure quand cela apparait nécessaire

3) Raconter le futur, esquisser les chemins possibles en partant d’un diagnostic de l’état actuel
• Visualiser de manière concrète et directe l’environnement climatique
• Illustrer l’incertitude sur les scénarios climatiques en donnant à voir un horizon opérationnel de court terme et un horizon à plus long terme pour anticiper les transformations nécessaires
• Faire prendre conscience que l’inaction n’est pas un chemin possible

4) Proposer des trajectoires « sans regrets » à court terme, pour favoriser des systèmes plus résilients à long terme et en s’appuyant sur des réseaux de suivi pérennes
• S’appuyer sur / et renforcer les réseaux de suivi et des observatoires pérennes des systèmes forestiers et agricoles ainsi que les dispositifs d’expérimentation et de recherche
• Montrer que des réponses accessibles sont disponibles aujourd’hui pour enclencher le passage à l’action, vers une transformation à long terme
• S’appuyer sur des politiques publiques existantes

5) Proposer des démarches de co-construction participatives et garder une flexibilité dans la gestion du projet
• Mobiliser les exemples de bonnes pratiques et les connaissances scientifiques et techniques
• S’appuyer sur les réseaux, instances et/ou outils existants de partage de la connaissance et de coopération
o Pour le secteur agricole : outils Agriadapt, CANARI, ORACLE, Clima-XXI, etc.
o Pour le secteur forestier : plateforme CLIMESSENCE, l’outil BIOCLIMSOL, etc.
• Utiliser des outils de sensibilisation et de communication participatifs et engageants

6) S’appuyer sur la pédagogie des aléas majeurs comme un argumentaire possible de mobilisation
• Montrer le lien entre changement climatique et répétition/fréquence des évènements passés : le changement climatique c’est ici et maintenant !
• Évaluer les impacts économiques et sociaux des évènements catastrophiques et les mettre en perspective avec les actions pouvant limiter ces risques
• Partager les connaissances : s’appuyer sur la science pour identifier les tendances
• Mettre en place des outils de sensibilisation et de communication participatifs
• Élaborer des politiques de prévention pour minimiser le risque de dégâts en cas d’augmentation des aléas

7) Mettre en avant les co-bénéfices créés
• S’appuyer sur les synergies entre les démarches d’adaptation avec les autres démarches (sur l’atténuation au changement climatique, la préservation de la biodiversité, etc.),
• Rappeler qu’il n’y a pas d’atténuation possible en forêt sans assurer la résilience des forêts face aux impacts du changement climatique.
• Développer des approches systémiques, tout en veillant à donner un maximum de lisibilité sur la finalité du projet
• Mettre en avant ces co-bénéfices pour mieux convaincre

8) Mobiliser les financements en faveur de l’adaptation
• Proposer des lignes de financement dédiées à la mise en œuvre de l’adaptation
• Lier création de connaissance, élaboration de stratégies et tests d’actions
• Favoriser la prise en compte de l’adaptation au changement climatique en cas de financements publics

CANARI : Climate ANalysis for Agricultural Recommendations and Impacts

Avec l’accompagnement de l’ADEME et du Ministère de l’agriculture et de l’alimentation, Solagro (spécialiste des questions agricoles et du changement climatique) et Makina Corpus (concepteur de solutions informatiques et d’applications web open source) ont développé le portail CANARI (Climate ANalysis for Agricultural Recommendations and Impacts).

Ce portail est une application web en accès libre de visualisation d’indicateurs agro-climatiques destinée aux acteurs du monde agricole pour faciliter la mise en place de démarches d’adaptation au changement climatique.

  • Une centaine d’Indicateurs Agro-Climatiques (IAC) sont disponibles, couvrant les besoins de différentes productions agricoles.
  • Très rapide, CANARI permet la visualisation d’un IAC en seulement quelques secondes, et pour 6 modèles climatiques différents.
  • Chaque Indicateur peut être calculé localement sur l’ensemble de la France métropolitaine pour la périodedu futur proche 2020-2050 ainsi que la période du futur lointain 2050-2100.
  • Les utilisateurs peuvent modifier librement les paramètres de chaque IAC proposé (période, seuil).
  • L’outil sera disponible le 28 février 2022 pour la France métropolitaine.

Le projet a bénéficié d’un appui scientifique du laboratoire français IPSL (Institut Pierre Simon Laplace) et également de l’unité MARS du JRC (centre de recherches de l’Union Européenne).

Ils l’ont fait ! Les acteurs agricoles et forestiers s’engagent pour lutter contre l’urgence climatique. À retrouver notamment dans le recueil d’expériences :

  • Pérenniser les exploitations de la filière Époisses face au changement climatique
  • Le climat change : les forêts du Haut-Languedoc font face !

Aller plus loin :


 

[1] GIEC : Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat

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