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E-COMMERCE : UN OUTIL POUR EVALUER ET REDUIRE L’IMPACT ENVIRONNEMENTAL DE LA LOGISTIQUE, DES TRANSPORTS, ET DES DEPLACEMENTS

Alors que l’e-commerce ne cesse de progresser, avec un volume d’activité estimé à 1 milliard de colis par an, l’ADEME et le Ministère de la Transition Écologique et de la Cohésion des Territoires présentent ce jour l’étude « e-commerce ». Celle-ci montre que les impacts du commerce en ligne sont fortement liés aux moyens de transports, aux emballages utilisés mais aussi aux comportements des consommateurs. L’étude met en évidence quatre leviers pour réduire les impacts de ce secteur et propose également « ECEL », un outil de simulation de scénarios et d’évaluation de l’impact environnemental du e-commerce. Ces éléments pourront contribuer au renforcement de la Charte d’engagements pour la réduction de l’impact environnemental du commerce en ligne.

L’essor du commerce en ligne en France et de son impact croissant sur l’environnement

Le commerce en ligne représente une part croissante et significative (14% en 2021) du commerce de détail en France. 42 millions de Français réalisent des achats en ligne (80% des Français de 11 ans et plus), pour environ une transaction par acheteur et par semaine (produits et services confondus). Le volume d’activité est estimé, en France, à 1 milliard de colis par an. Les émissions de gaz à effet de serre correspondant à ce niveau d’activité seraient de l’ordre de 1 million de tonnes de CO2. Etant donné ces impacts significatifs, l’essor grandissant du commerce en ligne doit donc s’accompagner d’une évaluation des impacts et de l’identification des leviers pour les réduire au maximum.

Le commerce en ligne et son impact environnemental, un secteur influencé par le comportement des consommateurs et les infrastructures disponibles

En premier lieu, l’étude confirme que les émissions peuvent varier considérablement en fonction des moyens de transport utilisés (et de leur degré d’optimisation), de l’utilisation ou non d’un sur-emballage de transport, et du comportement des consommateurs en termes de pratiques d’achat et de choix de mode de livraison. La passation de la commande et les sites d’achat en ligne présentent une contribution faible à l’empreinte carbone totale de la livraison.

Si le e-commerce présente des points forts sur le plan environnemental par rapport au commerce en magasin, grâce à l’absence de magasin, de déplacements consommateurs et grâce à la mutualisation des trajets de livraison à domicile, le commerce en ligne dispose également de nombreux points faibles : ils sont liés aux emballages des colis, au taux de chargement des véhicules, au recours au transport express et/ou aérien, à la distance parcourue ainsi qu’aux déplacements des consommateurs et aux retours. Toutefois, ces points forts et points faibles ne sont pas systématiques. Ils dépendent notamment du comportement du consommateur et des infrastructures mis à leur disposition (transport en commun, point de retrait…).

Ces travaux ont permis à l’ADEME de développer un outil de simulation des impacts du e-commerce. Il permet d’évaluer l’impact relatif entre un achat en ligne ou en magasin en paramétrant ces très nombreuses variables propres à chaque scénario d’achat. Cet outil est disponible uniquement sous format tableur à ce jour et pourra être communiqué sur demande.

« A ce jour, il n’est pas démontré que le commerce en ligne présenterait un avantage environnemental systématique et incontestable sur le commerce en magasin. De même, parmi les options de livraison, il n’est pas démontré un avantage environnemental systématique et incontestable de la livraison en point de retrait par rapport à la livraison à domicile, ni de la livraison à délai « standard » par rapport à la livraison rapide ou express », confirme Marc Cottignies, coordinateur technique de l’étude à l’ADEME.

Les acteurs et la logistique du commerce en ligne, un secteur en voie d’amélioration

Dans ce contexte, l’ADEME a d’identifié plusieurs leviers d’amélioration, portant sur les déplacements des consommateurs, les emballages, le remplissage des véhicules, et les acheminements express en longue distance.

Concernant les déplacements des consommateurs, les constats et les leviers sont les suivants :

  • Un tiers des retraits de colis par les consommateurs serait réalisé en voiture dans le cadre d’un trajet spécifique: on déplace ainsi un véhicule d’une tonne pour transporter un colis de 1 kg environ. Il faut donc encourager les consommateurs à privilégier des modes de déplacement alternatif (marche, vélo, transports en commun) ou à mutualiser les trajets pour différents motifs (profiter du déplacement domicile-travail pour passer au point de retrait) ;
  • Il faut également améliorer le maillage des points de retrait afin de proposer une offre satisfaisante dans les zones où un accès plus facile sans voiture est nécessaire;
  • Il faut éviter les échecs de livraison à domicile (qui entraîne une nouvelle présentation ou un déplacement du consommateur), à travers la mise en place d’outils de fiabilisation par les commerçants ou les prestataires;
  • Il est nécessaire d’éviter les retours (surtout s’ils occasionnent un déplacement du consommateur), en encadrant ces pratiques et en fiabilisant le choix du produit avant l’achat ;
  • Enfin, il convient d’informer le consommateur sur la meilleure option de livraison par rapport à ses contraintes (zone géographique, déplacement éventuel…)

Concernant les emballages, les leviers identifiés sont de :

  • Réduire le pourcentage de vide (estimé à 50%) par un meilleur ajustement du contenant au contenu afin de diminuer le volume des colis et la quantité d’emballage produite;
  • Supprimer le suremballage lorsque l’emballage du fournisseur le permet.

Concernant l’offre de livraison, il s’agit de :

  • Éviter des solutions de livraison qui dégradent la performance environnementale: la comparaison des délais (plus ou moins rapide) n’est pas une information permettant au consommateur de connaître la meilleure option “verte” ;
  • Sensibiliser les consommateurs au moment de l’achat pour regrouper les articles en une seule livraison ;
  • Le commerçant pourrait également moduler le coût de chaque option de livraison en fonction de sa performance environnementale;

Quant aux opérations de transport, elles peuvent être améliorées par les leviers suivants :

  • Limiter le recours au fret aérien(transport express sur de longues distances) : le consommateur devrait être informé des modes d’expédition et décider s’il confirme la commande et accepte la livraison dans ces conditions ;
  • Adopter des carburants alternatifs tout en conservant les mêmes véhicules ou en privilégiant de nouveaux (véhicules électriques avec prolongateur d’autonomie à hydrogène) ;
  • Recourir à des moyens de transport actifs (marche et vélo) pour réaliser les livraisons (cyclo-logistique sur les derniers kilomètres).

Dans le cadre de cette étude, des perspectives de travaux complémentaires sont envisagées, notamment une évaluation robuste des impacts du e-commerce via des jeux de paramètres statistiquement représentatifs, le développement et la mise à disposition de versions web de l’outil ECEL, développé dans le cadre de cette étude (voir ci-dessous) pour les commerçants et pour les consommateurs.

Méthodologie

L’étude a d’abord consisté à dresser un état des lieux de l’activité sur le plan opérationnel, en analysant les étapes de commande, d’entreposage et de préparation, de transports d’acheminement, de livraison, de déplacements éventuels des consommateurs, prenant en compte les retours, le cas échéant.

L’analyse a ensuite porté sur un référentiel d’évaluation quantitative d’impact environnemental des chaînes logistiques. Sur cette base, un outil de simulation de scénarios et d’évaluation d’impact environnemental, nommé « ECEL » (pour « Empreinte Commerce En Ligne ») a été conçu. L’outil permet de modéliser n’importe quel enchaînement d’étapes opérationnelles, en les paramétrant avec des données spécifiques. ECEL offre de comparer un ou plusieurs scénarios (un achat en magasin par exemple), selon des valeurs par défaut. Les différentes simulations effectuées permettent ainsi d’illustrer efficacement le poids relatif et la valeur absolue de l’impact d’un scénario. À titre d’exemple, ECEL est capable de produire l’impact environnemental d’un cas théorique – l’achat d’une paire de chaussures – selon 14 scénarios (cf. tableau n°1, émissions en gramme de CO2e).

 

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