Communiqué de Presse

QUELLES SOLUTIONS POUR UN DON ALIMENTAIRE DE MEILLEURE QUALITE ?

La « ramasse » constitue une source d’approvisionnement historique et importante pour les associations, leur permettant de récupérer sous certaines conditions des denrées invendues directement auprès des magasins. Dans un contexte où les grandes et moyennes surfaces ont fortement optimisé la gestion de leurs ventes pour limiter leurs pertes et où la demande auprès des associations augmente fortement, la question de la qualité des dons est devenue essentielle. A l’occasion de la Journée Mondiale de l’alimentation, l’ADEME, engagée de longue date dans la lutte contre le gaspillage auprès des différents acteurs de la chaîne alimentaire, publie un guide de recommandations pour un don alimentaire de meilleure qualité, avec la participation de l’Andes, des Banques Alimentaires, de la Croix-Rouge, des Restos du Cœur et du Secours Populaire. L’enjeu ? Comprendre et évaluer les problématiques liées au gaspillage alimentaire relevé au sein des structures de don alimentaire, en s’appuyant sur une étude réalisée par Framheim entre février 2022 et juin 2023 et menée auprès de vingt-et-une associations locales réparties sur toute la France.

 

Pour les associations, un essoufflement du modèle aux conséquences multiples

La pratique de la ramasse a été accélérée par la loi Garot du 11 février 2016 relative à la lutte contre le gaspillage. En plus d’interdire la destruction de denrées encore consommables par les grandes et moyennes surfaces (GMS), celle-ci a permis d’encourager les établissements d’une surface supérieure à 400 m2 à la signature d’une convention de partenariat avec les associations d’aide alimentaire, qui puisse préciser les conditions de leurs dons. Si les grandes et moyennes surfaces se sont mobilisées pour généraliser ces dons, deux constats sont aujourd’hui relevés par l’ADEME :

  • Face au changement de gestion des surstocks et au déploiement des rayons anti-gaspi dans les magasins pour optimiser les ventes, les quantités de denrées vers le circuit de don se sont sensiblement réduites et une partie est jetée…
  • Et sur cette partie jetée, l’étude estime que deux tiers sont liés à un problème de qualité. En effet, certains produits donnés sont soit déjà abîmés, soit la date limite de consommation (DLC) est trop courte.

Par ailleurs, la gestion des biodéchets devient une charge supplémentaire pour les associations : normalement sous la responsabilité des GMS et à leur charge, la gestion des invendus non distribuables est finalement laissée aux associations, impliquant souvent des coûts supplémentaires et une nécessaire réorganisation des process, surtout lorsque les biodéchets sont encore emballés. En effet, conformément à la loi AGEC de 2020, les associations doivent s’organiser pour mettre en place d’ici fin 2023 le tri des biodéchets. Certaines collectivités remettent en cause le fait de collecter indirectement, via les associations, les déchets des GMS, pouvant parfois aller jusqu’à l’arrêt de cette collecte. Les associations se retrouvent ainsi pénalisées, devant faire appel à des prestataires privés, engendrant des coûts supplémentaires.

Le manque de contrôle des obligations de qualité du don implique dès lors un transfert de charge vers les associations et leurs bénévoles, qu’il s’agisse du tri ou encore des coûts de gestion des déchets.

 

 Chiffres clés de l’étude

Sur l’ensemble des denrées issues du don, 16% en moyenne seront finalement jetées par les associations et donc non consommées par les bénéficiaires, soit :

·             38 000 tonnes, équivalent à 185 millions d’euros de produits reçus mais qui finissent à la poubelle

·             11 millions d’heures de bénévolat inutiles, pour collecter, trier et jeter ces produits impropres

·             10 millions d’euros de collecte & traitement de déchets pour les collectivités

·             64 millions d’euros de frais de fonctionnement inutiles pour les associations (location, énergie…)

·             65 millions d’euros non perçus par l’État, à la suite des déductions fiscales

 

Pour l’ADEME, une mise en œuvre collective indispensable pour accélérer les bonnes pratiques

D’un côté la ramasse reste indispensable pour les très nombreuses associations dont l’activité ne cesse d’augmenter, de l’autre, les donateurs optimisent de mieux en mieux leurs ventes avec des conséquences sur les quantités des dons. Face à cette évolution et ce dilemme, il est aujourd’hui nécessaire de faire évoluer les pratiques parfois en place de longue date et qui ne sont plus adaptées à la réalité du terrain.

3 grandes pistes ressortent :

  • Renforcer les contrôles sur la qualité des dons. Si la GMS s’est mise en ordre de marche pour réduire drastiquement son gaspillage alimentaire, cela n’est pas sans conséquence sur le don. Il faut donc s’assurer que ce qui reste à donner soit fait dans de bonnes conditions pour ne pas pénaliser les associations. La législation en place est déjà très complète tant sur les modalités que sur les critères de qualité. Veiller à son application permettrait d’apporter plus de garantie aux associations.
  • Une coopération à l’échelle locale: travailler de manière concertée et complémentaire à l’échelle d’un territoire entre associations pour mutualiser les efforts : partager les moyens logistiques, se répartir les jours de ramasse, partager les produits en trop grande quantité…
  • Un soutien clé des territoires: la coordination par un tiers comme les CCAS (Centre Communal d’Action Sociale) ou les PAT (Projets Alimentaires Territoriaux) permettant de mieux articuler les contraintes des donateurs et les besoins des associations se révèle très efficace : offrir des temps d’échange commun, proposer des espaces mutualisés, faire du lien avec des conserveries…

 

«La lutte contre le gaspillage alimentaire est un combat à la croisée des enjeux éthiques, environnementaux, sanitaires, sociaux et économiques. À cet égard, notre pays a pris des engagements importants en adoptant la loi relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire (dite loi Garot), qui vise à encourager les dons aux associations œuvrant contre la précarité alimentaire. Cependant, il est impératif d’accélérer nos efforts.

L’étude publiée ce jour par l’ADEME, permet d’identifier des lacunes, dont certaines n’avaient pas été anticipées. C’est pourquoi, dans les prochaines semaines, je souhaite réunir les parties prenantes engagées dans la lutte contre le gaspillage alimentaire. L’objectif sera d’évaluer la mise en œuvre des mesures et de trouver des moyens d’améliorer nos politiques publiques. En nous appuyant sur les recommandations de l’ADEME, nous continuerons le travail engagé avec les grandes surfaces, l’industrie agro-alimentaire, les donateurs, les collectivités territoriales et les associations pour réduire le gaspillage alimentaire, faciliter les dons et explorer de nouvelles sources d’approvisionnement.», Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires

 

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